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 Les confessions nocturnes - Fauste

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Alice Atkins
Les confessions nocturnes - Fauste 81wNzm
(andysciazkoart)
→ ORDRE CLANIQUE : Solitaire
→ NUISANCE DEPUIS : 36 ans (21.04.1988)
→ SOUS L'EMPRISE DE : Précognition (passé et futur). Essentiellement par les rêves mais aujourd'hui par contact.
→ ERRANCE : Perdue en ville
→ TROMPE L'ENNUI : Illustratrice de BD, peintre, artiste dévouée à son art
→ PROFIL PSYCHOLOGIQUE : Douce, Discrète, Observatrice, Calme, Conciliante, Curieuse, Consciencieuse, Rêveuse, Travailleuse, Jovial, Sincère, Réfléchie, Sensibilité artistique, Fragile, Angoissée, Docile, Introvertie, Résignée
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Alice Atkins
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MessageSujet: Les confessions nocturnes - Fauste   Les confessions nocturnes - Fauste Icon_minitime5/4/2024, 13:10

Les confessions nocturnes
@Fauste Erikdottir & Alice Atkins


Après avoir passé un bon mois dans son cottage à une heure de route de la ville, le retour de l'illustratrice avait été fait en toute discrétion. Elle était rentrée chez elle, sans un bruit, posant son sac contenant ses affaires prises à la va-vite en décembre. L'odeur de térébenthine, bien qu'adoucit avec son absence restait toujours présente, incrustant les murs depuis le temps. Le temps de ranger ses affaires, jeter la nourriture qui avait périmé depuis dans son frigidaire et sur sa table, elle aéra un temps l'appartement, se fumant une clope sur le balcon. C'était posé sur le rebord qu'elle constata que l'appartement de sa voisine était dans le noir complet. Pas de musique, pas de visiteurs nocturnes à fourrure qui squattaient l'appartement. Non, quand Fauste était là, il y avait toujours un fond musical. Un peu comme Alice quand elle travaillait. Qu'importe l'heure, il y avait toujours un peu de musique, jamais très fort pour ne pas réveiller les voisins, parfois à peine audible. Elle repensait à ce que lui avait dit sa voisine concernant Peter. Elle avait voulu la mettre en garde, mais Alice n'avait pas été réceptive à ses paroles, ne voulant pas croire ce qu'elle disait de cet homme, certes, possessif qui ne voulait que son bien derrière cette attitude.

Ainsi, les jours passèrent, elle poursuivait son travail dans son appartement, organisant par téléphone l'exposition, voyant comment les œuvres allaient pouvoir être disposé dans le Carré des artistes. Si elle poursuivait ses peintures, elle continuait à mettre sur papier ses visions qu'elle recevait régulièrement dans ses rêves, voyant jour après jour que Fauste n'était pas rentré bien qu'il y ait deux ratons laveurs qui venaient dormir chez elle. Pas de musique. Elle n'avait pas voulu déranger les deux hommes qu'elle ne connaissait que vaguement de loin en lui posant la question. Et vu qu'elle avait pris ses distances avec la sorcière, elle ne savait trop comment la contacter pour prendre de ses nouvelles. Alors elle regardait ce bout de balcon bien fourni en verdure qui jurait avec la table et les deux fauteuils en osier que contenait celui de l'illustratrice. Alice n'avait pas la main verte pour oser mettre des plantes sur son balcon.

Mais pourtant une quinzaine de jours après son retour, la grande blonde finit par entendre de la musique dans l'appartement de sa voisine. Un signe indicateur qu'elle était de retour. Peut-être des vacances ? Alice était en train de vérifier la cuisine de son jambalaya, remuant avec une spatule la préparation. Cela faisait longtemps qu'elle n'en avait pas fait un et avait envie de se faire plaisir. Bien évidemment, elle cuisinait toujours trop et avait souvent des restes qui finissaient par moisir dans le fond de son frigo quand elle l'oubliait. Relevant la tête alors qu'elle coupait le feu, elle regarda l'heure, considérant que Fauste n'aurait peut-être pas envie de cuisiner à cette heure, quand bien même elle aimait cuisiner. Ce serait aussi l'occasion de s'excuser d'avoir pris ses distances. Alice se laissa une dizaine de minutes pour également laisser reposer le jambalaya puis remplit un tupperware copieusement du repas qu'elle venait de préparer. Il y avait à manger pour plusieurs.

Se prenant l'angle de la table, elle poussa un juron étouffé et sortit sur le balcon. C'était devenu une habitude de ne pas passer par la porte d'entrée. Elle passa la petite rambarde qui délimitait les espaces, priant toujours que sa maladresse ne l'amène pas quelques mètres plus bas. Malgré l'hiver, elle portait un pantalon ample léger dans les ton clair, un t-shirt ample et une veste en laine épaisse dans les tons ocres, le tout donnant à l'artiste un air hippie qu'elle avait toujours eu. La fenêtre était fermée, mais elle voyait bien de la lumière à l'intérieur. Elle frappa alors à la fenêtre, attendant d'avoir une réponse ou de voir un visage familier. C'était un peu penaude qu'elle se présenta à la blonde, son plat en verre dans les mains.

- Salut Fauste, je me suis dit que tu n'aurais peut-être pas envie de cuisiner alors je t'amène de quoi manger, si tu as faim ?



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Fauste Erikdottir
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→ SOUS L'EMPRISE DE : Lecture de pensées (don aléatoire) niv. 2 - Tisserand de la Voie de l'Esprit (Luciole)
→ ERRANCE : Au Cocodrie's et un peu partout en fonction d'où son travail la mène
→ TROMPE L'ENNUI : Restauratrice d'oeuvres et barmaid au Cocodrie's Whisky
→ PROFIL PSYCHOLOGIQUE : Enjouée. Souriante. Optimiste. (Trop) gentille. Naïve. Humour cynique. Espiègle. Passionnée. Rêveuse. Secrète. Affectueuse. Ne sait pas mentir. Ne sait pas demander de l'aide. Mental en béton armé.
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MessageSujet: Re: Les confessions nocturnes - Fauste   Les confessions nocturnes - Fauste Icon_minitime14/4/2024, 14:40

Son appartement lui fit l'effet de découvrir un nouvel espace. Tout lui faisait étrange. Tout était à sa place et pourtant tout lui semblait différent à la fois. Il manquait quelque chose, tout lui semblait froid, comme si elle était entrée chez quelqu'un d'autre. Elle ne s'était absentée que quinze jours -peut-être trois semaines si elle avait tout mis bout à bout- et n'était pas vraiment rentrée de gaieté de cœur.
La chose avait été un peu bizarre, à la réflexion. Sur le pas de la porte, avec son sac de sport -ils n'avaient même pas vraiment parlé de laisser des affaires chez lui ou non, même si ça tombait un peu sous le sens vu qu'ils reprenaient leurs habitudes de se voir plusieurs fois par semaine-, ils s'étaient dit au revoir comme s'ils n'osaient pas se dire autre chose. Peut-être qu'ils n'en avaient pas vraiment envie, d'un autre côté, la vie devait reprendre son cours. Il était en vie, elle devait se reposer, ils avaient tous les deux beaucoup de choses à rattraper. Elle devait reprendre son apprentissage de la magie, même si Heli et elle avaient continué à le faire du mieux qu'elles pouvaient, s'arrangeant pour se voir le plus proche possible de l'appartement du Ptah. Fauste redoutait que sa mentor ne puisse lire dans son esprit ce qu'il se passait, elle était à peu près aussi bonne pour verrouiller son esprit que pour mentir, cependant le sujet n'était jamais vraiment venu sur le tapis. Elle allait pouvoir reprendre son emploi au Cocodrie's Whisky. Elle avait rapidement expliqué à Piotr que tout allait beaucoup mieux, sans rentrer dans les détails sordides de ce qu'il s'était réellement passé. Elle était encore épuisée, mais elle ne pouvait pas s'autoriser à s'arrêter, ce serait prendre le risque d'avoir encore plus de mal à reprendre le rythme. De toutes les façons, même si on lui avait dit de prendre du temps pour elle, elle ne l'aurait pas fait. Elle ne le faisait jamais vraiment.

Les ratons n'étaient pas là. Ils avaient échangé des messages, ils avaient malheureusement quelque chose à faire. C'était peut-être mieux ? Elle n'en était pas sûre. Tout ce vide après avoir passé deux semaines à toujours avoir quelque chose à faire, toujours une présence, si ce n'étaient deux ou trois dans les pattes... Finalement, c'était peut-être bien, une soirée toute seule, non ? Juste pour elle ? Avant toute chose, la petite blonde déposa Kani, son lapin nain, dans son enclos. Il avait fait de gros efforts sur son tempérament jaloux pendant ces deux semaines, à tel point qu'il était devenu le compagnon de sieste de Constantine, lui qui avait été si jaloux de ce grand humain sans comprendre qu'il n'était pas le deuxième animal de compagnie de l'apprentie sorcière. Elle avait pris quelques photos qui rendraient un peu de joie à ces deux semaines, le petit lapin étalé de tout son long, pattes arrière comprises, sur le torse du sorcier, devant sans doute plus profiter de la chaleur qu'il ne devait lui en apporter. Il se glissait parfois dans la main du Ptah ou dans le creux de son cou, et il était même arrivé les derniers jours qu'il ne lui renifle la barbe avant de donner quelques petits coups de langue contre sa joue, chose qu'il n'avait même jamais fait avec sa maîtresse. Le petit lapin jaloux et boudeur était enfin apprivoisé. Son petit réservoir d'eau rempli et une gamelle de nourriture plus tard pour la boule de fourrure blanche, elle avait déballé ses affaires, lancé une lessive et mis de la musique. C'était bon, de retrouver certaines habitudes.

Alors qu'elle tournait et retournait pour savoir ce qu'elle allait faire -se remettre au travail ou lire un des romans qui attendaient pour décompresser un peu-, elle sursauta presque en entendant de petits coups contre la porte-fenêtre du salon. Sans crainte ni appréhension, Fauste alla voir, et fut presque surprise de ne pas l'être quand elle vit la silhouette d'Alice, sa voisine et amie, toute de clair vêtu, derrière la vitre. Elle marqua un temps d'arrêt, puis un sourire sincère se dessina sur ses lèvres alors qu'elle allait lui ouvrir.

« Alice ! Ça fait longtemps. Tu es revenue ? »

Y aurait-il jamais une trace de rancune dans le cœur de Fauste ? Elle se demandait même parfois pourquoi ce mot existait. Si Alice et elle avaient eu un petit différend, il n'y avait pas de quoi fouetter un chat, ou quoi que ce soit d'autre d'ailleurs, à part peut-être l'homme qui avait provoqué la situation entre elles. Est-ce qu'elle l'avait quitté, ou était-il revenu à la raison ? La réponse était presque trop évidente, aussi, elle ne la posa pas. De la même manière qu'elle-même avait besoin d'un moment de calme, la médium devait en avoir besoin aussi ? Tout en s'effaçant, elle fit un petit signe de tête pour l'inviter à entrer, se disant qu'il devait faire frais en la voyant drapée dans sa veste en laine. A l'inverse, Fauste était égale à elle-même, en short à pinces et t-shirt noirs, elle n'avait jamais vraiment froid, surtout à l'intérieur.

« Je t'en prie, entre. C'est gentil, d'avoir pensé à moi, merci. Ça sent super bon, en tout cas, déjà rien qu'à travers la boîte ! Attends, je vais te débarrasser. »

Elle faisait un peu exprès de ne pas aborder le sujet. Outre le fait qu'elle n'y serait jamais allée frontalement, elle ne voulait pas déstabiliser la médium, qui semblait penaude, et au contraire la mettre à l'aise. Elles auraient tout le temps de parler plus tard.

« Installe-toi. Je vais mettre la table. J'imagine qu'il vaut mieux manger tant que c'est chaud. Je te sers quelque chose à boire ? »

A nouveau pleine de l'énergie qu'elle avait toujours quand il fallait s'occuper d'une autre personne, elle déposait le plat sur la table, commençait à prendre les assiettes, les couverts, tout en jetant régulièrement un regard avec un sourire engageant pour s'assurer qu'il n'y aurait pas de malaise, car il n'y avait vraiment pas de raison que ce ne soit pas le cas.



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MessageSujet: Re: Les confessions nocturnes - Fauste   Les confessions nocturnes - Fauste Icon_minitime15/5/2024, 12:35

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@Fauste Erikdottir & Alice Atkins


Un peu de compagnie ne ferait de mal à personne. Dan n'avait pas à passer toutes ses soirées avec elle, surtout en ayant écarté le danger. Si Alice avait réussi à passer des soirées seule, elle trouvait là une excuse pour ne pas l'être. Le tupperware de jambalaya dans les mains, elle frappa à la porte et fut rapidement accueillit la jeune femme dont le sourire sincère apparut rapidement après un court temps. Malgré la distance qu'Alice suite à la mise en garde de Fauste concernant Peter, cette dernière avait remarqué son absence depuis décembre. La médium ne sentit pas de rancune, ni d'amertume dans cette distance mise par nécessité par une femme qui refusait de voir l'évidence de la toxicité de l'homme qui avait partagé son lit. Alice haussa une épaule, banalisant la réalité, répondant par un sourire placide.

- Oui, j'avais besoin d'une retraite loin de la ville. Je suis rentrée au début du mois pour m'occuper des préparatifs.

La blonde avait bien conscience qu'elle ne pourrait rester éternellement éloignée de la ville. L'envie d'être mordue, l'envie de se rapprocher de ses proches, l'envie d'avancer était là. Et elle commençait à manquer d'herbe malgré les champignons donnés par Morgana, elle continuait son vice. Elle la remercia en passant la porte-fenêtre alors que la jeune femme commençait déjà prendre les choses en main, mais Alice la coupa assez rapidement alors qu'elle voulait qu'elle s'installe et mette la table.

- Oui, autant le manger chaud, mais laisse moi t'aider, lui proposa-t-elle connaissant assez la sorcière à l'aura d'un bleu azur clair.

Fautes aimait s'occuper des autres même si elle était épuisée, s'effaçant totalement pour les autres. Alice insistera pour l'aider à mettre la table pendant que l'autre blonde s'occupait de sortir la vaisselle du placard.

- Si tu as une bière ou du vin, je veux bien, sinon, je prendrai ce que tu as, tout me va ! Après, j'ai de quoi aussi !

Elle n'aurait qu'à enjamber la barrière séparant les deux balcons après tout, c'était l'avantage de vivre une porte à côté. Et il fallait dire que l'illustratrice avait, en effet, un placard bien garni en alcool divers et varié même si elle buvait essentiellement de la bière et du vin, elle aimait, quand elle recevait, avoir du choix. Surtout qu'il ne venait pas dans l'idée à la jeune femme qu'elle puisse lui proposer également des boissons sans alcool. Et parce que l'illustratrice ne savait trop comment lui dire, elle préféra s'intéresser à cette absence pendant la quinzaine de jours où elle avait été présente.

- Tu étais en vacances ? J'ai vu passer tes deux colocs, mais j'ai vite compris que tu n'étais pas là, tu as pu te reposer ?

Parce qu'en réalité, si elle baignait d'une aura de bonheur accompagnée de cette couleur que la médium refusait d'enlever de ses yeux, Fauste semblait assez fatiguée comme si elle ne s'était pas arrêtée. Si elle n'avait pas besoin d'aller chercher à boire chez elle, Alice s'installerait sur une des chaises, ouvrant le Tupperware où la chaleur se dégageait et avec elle la bonne odeur d'un jambalaya qu'elle avait l'habitude de faire.



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MessageSujet: Re: Les confessions nocturnes - Fauste   Les confessions nocturnes - Fauste Icon_minitime2/6/2024, 15:34

Une retraite loin de la ville. Parfois, Fauste se demandait comment les gens faisaient pour mentir aussi facilement, mais quand elle décortiquait la chose, en réalité la plupart du temps, les gens ne mentaient pas si bien, c'étaient les autres qui acceptaient de ne pas s'attarder dessus par égard pour eux. Comme un petit drapeau rouge pour dire que l'on avait besoin de changer de sujet. Pour le coup, l'apprentie sorcière n'en voulait pas à sa voisine. Si c'était une soirée tranquille entre filles dont elle avait besoin, à ne parler que de choses futiles et légères en plaisantant, elle pouvait largement lui offrir ce temps. Pour être parfaitement honnête, elle n'était pas contre. Quand elle était seule, sans savoir quoi faire, elle se rappelait cet instant fugace et pourtant qui lui avait semblé si long, quand le Ptah avait rendu un souffle qu'ils avaient tous les deux pensé être le dernier dans ses bras. Il aurait tout aussi bien pu refermer ses doigts sur son cœur et le lui arracher en sombrant dans les limbes, elle n'aurait pas eu de douleur plus vive, et pourtant, elle lui avait souri, comme si de rien n'était, jusqu'au bout. Et peut-être qu'elle aussi donnerait une autre raison, si jamais Alice avait elle aussi remarqué l'absence de la petite islandaise. Elle verrait bien, l'heure n'était pas aux suppositions.

La batterie de secours était branchée, et avec elle, l'habitude de tout faire pour les autres. Elle était ainsi au travail, même si Elias avait assez d'assurance pour ne pas se faire manger, et les ratons lui avaient peu à peu définit des limites pour qu'elle ne fasse pas constamment tout. A vrai dire, ils insistaient tellement pour qu'elle se repose que parfois, elle avait envie de se vexer, mais la sensation passait bien vite. Le seul qui avait réussi l'exploit de piquer son ego avait été aussi celui qui avait été le plus victime de son besoin de constamment s'occuper des autres, même s'il n'avait pas pu lutter au vu de l'état dans lequel il se trouvait. C'était d'ailleurs une chose bien étrange, d'extérieur, de voir un petit bout de femme qui pouvait être si doux et si docile être capable de vous rogner autant d'espace en si peu de temps. Définitivement une mauvaise herbe un peu décorative. Quand Alice insista cependant, elle ne put que lui adresser un sourire à la fois doux et reconnaissant, lui préparant une petite pile composée de deux assiettes et des couverts adéquat, lui glissant un « Tiens. » à peine soufflé. Il fallait qu'elle apprenne à se reposer un peu, à délester ses épaules fatiguées.

« J'ai les deux ! Mais je pense qu'un bon vin ferait honneur à cette petite merveille que tu nous a préparée. » Elle se pencha pour se mettre devant le porte-bouteilles, garni de quelques bouteilles de vins italiens -ceux qu'elle connaissait le mieux- et lui demanda : « Plutôt rouge ou blanc ? »

Elle prit la bouteille en question, la déboucha avec toute son expertise de barmaid qui travaillait dans un bar qui ne servait pas vraiment de vin, et déposa deux verres sur la table mise par les soins de la médium, qu'elle remplit avec un léger sourire. C'était bien, une soirée simple, improvisée. Le genre de choses qu'elle n'avait plus vraiment fait depuis qu'elle était ici. Trop de monde et trop d'activités, le tout combiné à son rythme de vie plutôt régulier et ses fameuses séances de rattrapage en magie trois fois par semaine, elle avait parfois l'impression qu'elle devait réserver trois semaines à l'avance pour avoir le privilège d'une entrevue avec l'un de ses amis.

Puis vint la question qui tue sans le savoir. D'un geste preste, elle alla chercher de quoi servir le jambalaya dont la bonne odeur montait déjà aux narines. Que pouvait-elle vraiment lui dire ? Qu'elle s'était installée deux semaines chez Constantine avec l'espoir qu'il irait mieux, en lui imposant pour ne pas le supplier de la laisser l'aider, puis qu'elle avait compris au fil des jours que chaque matin où il se réveillait encore était peut-être le dernier, jusqu'à voir arriver le dernier instant, la dernière flamme, celle qui vous laisse juste dans le vide et dans le noir quand tout s'arrête ? Qu'elle avait vraiment eu l'impression que sa vie s'était arrêtée avant même de commencer, alors qu'ils avaient à peine goûté au plaisir de vivre à deux ? Qu'elle s'était pensée maudite parce que pour une fois qu'elle était tombée amoureuse, l'homme de sa vie s'éteignait à petit feu ? Fauste faisait le service tout en réfléchissant à comment présenter la chose, minimisant autant le traumatisme qu'elle avait envie de garder une partie de cet événement comme on en garde certains pour l'intimité. Parce qu'il ne regardait personne d'autre que les gens qui étaient présents ce soir-là. Mais elle ne savait pas mentir non plus, et elle avait peut-être bien plus besoin d'en parler qu'elle ne l'imaginait.

« Pas vraiment. En fait, j'étais chez... » Elle laissa un moment le mot en suspens. Ami ? Copain ? Compagnon ? Elle se rappela la sensation de l'anneau d'argent orné d'une pierre à son annulaire gauche, et reprit bien vite le fil de ses mots. « … mon copain. Il était très malade et refusait de se soigner, alors je l'ai un peu obligé à prendre soin de lui. Un peu, que dis-je, je l'ai carrément obligé. Et comme il est très, très, très, très (elle compta sur ses doigts pour rajouter un peu d'emphase), très têtu, il a fallu qu'on se prenne une vraie grosse frayeur pour qu'il accepte de faire quelque chose. En attendant,  on a passé deux semaines éprouvantes. Enfin, le plus important, c'est qu'il aille mieux. »

Elle acheva de faire le service et s'assit en face de son amie, avec un sourire qui pouvait contraster avec ce qu'elle venait de raconter. Pragmatisme nordique. Elle trinqua avec Alice, glissant un petit « Santé, surtout ! » non sans humour.

« Et toi, alors ? Tu parlais de préparatifs. Qu'est-ce que tu nous prépares ? D'ailleurs, si tu as besoin d'aide, tu n'hésites pas. »

Elle lança un petit « bon appétit » et écouta la dessinatrice tout en s'armant d'une fourchette, attendant qu'elle ait fini ou fait une pause dans sa réponse pour la complimenter : « C'est délicieux. Tu as eu une super idée, je ne pensais pas que je mourrais de faim à ce point-là. C'est parfait. »



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MessageSujet: Re: Les confessions nocturnes - Fauste   Les confessions nocturnes - Fauste Icon_minitime20/6/2024, 13:08

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L'excuse était passée et la sorcière ne demandait aucune justification, chose qui rassurait Alice qui n'était pas encore prête à lui confirmer qu'elle avait eu raison au sujet de Peter. Entrant dans l'appartement de Fauste, qu'elle avait eu l'occasion de voir quelques fois, la médium insista pour l'aider à mettre la table, vivant à chaque fois la même situation quand elles passaient un repas chez elle. A vouloir aider, à vouloir rendre service ou bien à vouloir s'occuper de son hôte, les deux femmes avaient ça en commun. Et la presque trentenaire accepta dans un souffle, lui tendant les assiettes et couverts. Alice put ainsi mettre la table, demandant si elle avait de la bière ou du vin, mais s'adaptant facilement aux alcools présents chez sa voisine, ayant toujours la possibilité de récupérer ce qu'il manquait chez elle directement. Mais Fauste était plus partante pour boire du vin ce soir pour accompagner le jambalaya. Et si Alice n'y connaissait rien en accompagnement, elle lança au pif :

- Rouge, ça me va ! Merci.

Et le bruit agréable de la bouteille qui était débouché sonnait comme une note de musique à ses oreilles. Elle s'installa à la table, posant une question qui déstabilisa son hôtesse, cette dernière mettant un temps avant de répondre, profitant du service pour s'accorder quelques secondes de répit. Ce n'était pas des vacances et si Alice apprenait qu'elle avait un petit ami, personne dont elle ignorait l'existence jusqu'à présent, elle comprit que c'était assez récent. L'homme semblait assez têtu, refusant certainement d'aller se soigner à l'hôpital. Et c'était presque naïvement qu'elle lui dit :  

- Oh ! Merde ! Je comprends. Il a fini par céder à aller à l'hôpital, c'est bien !

Une fois les assiettes remplies, Fauste s'assit en face de la médium, levant son verre pour trinquer avec elle.

- Santé, répéta-t-elle amusée avant de boire une gorgée.

La question revint vers elle, rebondissant sur les préparatifs qu'elle avait évoqués un peu plus tôt. Secouant la tête, sa main banalisant la situation. Plantant sa fourchette dans son assiette, elle commença à manger après avoir souhaité un bon appétit en réponse à celui de Fauste, prenant le temps de lui donner également de ses nouvelles.

- Oh, moi ça va, je prépare une exposition qui se passera au Carré des Artiste dans le quartier de Jefferson place. Ma première expo, il reste encore des choses à faire, mais le plus gros a été fait. J'ai pris du temps pour terminer mes peintures et je laisse le soin à une pro pour la gestion, les invitations et tout ce qui nécessite de l'organisation. C'est prévu pour dans deux mois. Tu es invitée si tu libres au vernissage ou a passer quand tu auras l'occasion.

Une invitation où il n'y avait aucune obligation. Accompagnée ou seule comme elle le souhaitait, Fauste connaîtra des visages connus comme Morgana. Et s'il y avait encore beaucoup de pudeur, car ne pas dévoiler son identité pendant toutes ces années avait été un confort, avoir vu la mort de près lui avait fait comprendre qu'elle n'avait rien à perdre. Ainsi, Wonderland aura un visage. Fauste complimenta le repas et Alice ne put s'empêcher de sourire.

- Merci, je me doute bien que quand tu te voues à quelque chose ou à quelqu'un, les besoins comme manger et dormir passent au second plan. J'ai cuisiné pour un régiment si tu as besoin. Surtout que j'ai appris que tu avais rejoint le Coven, tes journées ne doivent pas être de tout repos. Comment ça se passe pour toi, d'ailleurs ?

C'était une question qui n'aurait que peu de sens pour l'illustratrice car elle ne connaissait pas grand-chose de l'organisation ni du fonctionnement du Coven. Tout ce qu'elle savait, c'était que Morgana y était, qu'elle avait croisé un homme, Constantine, qui bien qu'il ne lui ait montré aucune attitude agressive, avait réussi à lui faire peur, Dan avait un peu renversé la balance sur son image parfois négative du Coven.


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MessageSujet: Re: Les confessions nocturnes - Fauste   Les confessions nocturnes - Fauste Icon_minitime23/7/2024, 11:05

En devenant apprentie sorcière, elle se demandait parfois si elle n'avait pas espéré que son don passif disparaisse avec la pratique, mais ce n'était pas encore le cas. C'était étrange d'ailleurs comment les pensées affleuraient à son esprit. Elle aurait été incapable de le décrire si elle avait voulu, d'ailleurs, car les pensées des autres n'apparaissaient pas différemment dans son esprit de ses propres pensées. Ce n'étaient la plupart du temps ni des mots concrets, ni des images comme des hallucinations, mais plutôt une construction de l'esprit, qui était là sans être là. Parfois, les messages étaient clairs, s'imprégnaient dans son esprit et elle les comprenaient de façon parfaitement dicible. D'autres fois, c'était comme une intuition, un sentiment, quelque chose qui dormait au fond d'elle sans qu'elle ne puisse mettre le doigt dessus avec certitude. Dans ce cas précis, elle sentait qu'il y avait quelque chose qui traînait dans l'esprit d'Alice, et que cela avait à voir avec le fait qu'elles ne se soient pas parlé pendant un temps. Comme toujours dans ces moments, elle faisait celle qui n'avait rien entendu, rien compris, qui n'en savait pas plus que ce qu'elle était censée savoir. C'était amusant, d'ailleurs, de se dire qu'elle était à la fois parfaitement incapable de mentir et d'une habileté incroyable pour faire celle qui ne savait pas. C'était peut-être pour cette raison qu'au fil des années, beaucoup de personnes l'avaient prise pour une ravissante idiote ? C'était peut-être un peu difficile d'avaler que ce genre de jugements basiques étaient de sa faute, mais malheureusement, elle ne pouvait pas décemment croire qu'elle n'était pas au moins en partie responsable de l'image qu'elle véhiculait d'elle-même.

Fauste avait de toute façon été prise au dépourvu par la question de la jolie blonde, qui l'avait finalement mise dans une posture légèrement délicate. En réalité, il n'y avait pas grand chose de problématique puisque déjà, Alice connaissait le surnaturel, elle aurait donc pu lui expliquer sans trop de difficultés ce qu'il s'était passé, que ce soit dans le détail ou non. Mais puisque le surnaturel n'était pas un problème, elle en revenait à une situation plus banale : est-ce que l'on parlait d'une chose aussi intime et privée que la santé des autres, même si cela nous concernait aussi indirectement ? Pour cette raison, mais aussi parce qu'elle ne savait même pas si elle allait parvenir à parler de tout ça, si elle avait même les mots pour en parler. Sa réponse, même si un peu évasive, avait semblé suffire à Alice, et c'était tout ce qui comptait. Peut-être, plus tard, elle entrerait plus dans les détails, car elle s'était rendu compte que sa voisine ne devait même pas savoir qu'elle avait quelqu'un dans sa vie, puisque Constantine et elle s'étaient tourné autour pendant des mois sans en parler à personne, sans que personne ne le sache vraiment, même si tout le monde l'avait plus ou moins vu, mais après tout, c'aurait pu simplement être une impression, non ? Et peut-être aussi que le sujet ne reviendrait pas sur le tapis, car elles avaient beaucoup de choses à se dire et à rattraper.

Quand Alice rebondit sur son explication en parlant d'hôpital, et que c'était bien, Fauste acquiesça. Elle avait fait une déduction qui n'était pas tout à fait vrai, mais dans le fond, sans magie, il serait allé à l'hôpital, en effet... Dans un des frigos, ce grand imbécile ! Mais elle n'avait ni le temps, ni l'envie d'être en colère. Elle fit une petite moue qui voulait dire qu'elle était soulagée et que ça avait duré trop longtemps à la fois, en lui glissant un petit « oui ! » sur un ton faussement impatient qui voulait dire « enfin ! ». Elle était un peu injuste dans son attitude, alors qu'elle faisait en sorte qu'il essaie de ne pas culpabiliser par ailleurs, alors que dans le fond, elle avait tout de même suivi sa volonté de ne prévenir personne. Elle ne referait pas le passé, elle le savait, et d'une certaine manière, elle lui avait déjà forcé la main en lui faisant accepter sa présence chez lui alors que sa propre initiative, il serait sans doute resté seul jusqu'à son dernier instant. Un sujet qui se termina par un « Santé ! » des plus judicieux -et ironique-, mais après tout, il fallait bien fermer ce chapitre et le plus tôt était le mieux, selon l'apprentie sorcière.

Vint une chose bien plus réjouissante et qui illumina le visage de l'islandaise. Une expo !? Alice allait faire une expo !? Non !? Pas possible ! Elle se retint de pousser un petit cri de joie et d'admiration de suite, même si cette retenue était bien visible, pour la laisser parler jusqu'au bout. Bil ne l'avait peut-être pas choisie pour rien, parmi toutes les personnes qui priaient la chance et qui faisaient rayonner le positif autour d'elles, mais il fallait savoir se mettre en retrait pour laisser fleurir les autres, et les aider à le faire quand ils en avaient besoin.

« Je ne raterai ça pour rien au monde. La personne qui voudra me voir ce soir sera obligée de venir à ce vernissage pour le faire ! » lança-t-elle d'abord sur un ton taquin, avant de reprendre sur un ton plus doux, sincèrement heureux pour son amie. « C'est une excellente chose, Alice, je suis tellement contente pour toi. Et si tu as besoin de quoi que ce soit, y compris à la dernière minute, tu n'hésites pas à me demander. Je serai ravie de pouvoir t'apporter mon aide, d'une quelconque manière. Et j'ai vraiment hâte de voir tes peintures ! J'ai l'intuition que ça sera une grande réussite. »

Elle ne pouvait pas vraiment lui expliquer le pourquoi du comment, ni vraiment lui assurer que ça serait le cas, mais elle avait parfois cette sensation de voir quelque chose qui allait forcément fonctionner. C'était étrange à dire, à décrire, et surtout à décortiquer, car après tout, était-ce plus son propre ressenti vis à vis d'Alice ou la somme de plusieurs choses qu'elle avait observées chez elle qui faisait qu'elle sentait que c'était le bon moment, la bonne chose ? Elle ne savait pas trop, mais si Alice lui posait la question, elle aurait beaucoup d'arguments à sa faveur, elle en était certaine.

La question revint sur elle, mais elle n'était pas gênée le moins du monde. C'était plus simple de parler de ça, car c'était des faits simples et démontrables, d'une certaine manière.

« Ne t'en fais pas, c'est surtout que je viens de rentrer juste aujourd'hui, et c'était un peu le sauve-qui-peut. Une bonne nuit de sommeil et je serai repartie ! Mais c'est adorable, merci. » Elle marqua une courte pause, puis reprit : « Disons que c'est comme reprendre des études quand ça fait des années que tu travailles, et que tu es dans une routine. J'ai la chance de n'avoir jamais arrêté de faire des recherches pour de nouvelles techniques ou de nouveaux matériaux dans mon métier, ça m'a entretenue un peu dans cette dynamique mais... C'est très prenant, c'est le moins qu'on puisse dire ! » Elle rit un peu, pour marquer la fin de sa phrase. A nouveau elle reprit, mais sur un ton plus rêveur. « Le plus dur, c'était d'accepter que je pouvais le faire. Que je pouvais devenir une sorcière sans devenir un danger pour les autres, c'était ce qui me faisait le plus peur. La magie, c'est compliqué, mais avec du travail et de la rigueur, on peut je pense venir à bout d'à peu près tout. Et puis, je suis super bien entourée. Ma mentor est... Elle est merveilleuse. Je ne saurai pas comment expliquer, c'est juste évident, avec elle, comme si elle me connaissait déjà par cœur. Il y a Morgana, aussi, qui est prête à tester toutes mes idées, même si ça peut sembler un peu dangereux. Et puis, mon copain m'aide beaucoup aussi. C'est quasiment la plus grosse partie du temps que l'on passe ensemble, d'ailleurs. » Elle laissa passer un court silence encore. « Je voudrais faire des illusions pour aider les gens. Les aider à surmonter des peurs, des angoisses, des traumatismes... A se sentir bien, à comprendre, à voir ce qu'il y a de beau et de bon en eux. Je crois que c'est ça qui me donne l'impression que ce n'est pas si terrible de devoir travailler autant pour le faire. A chaque fois que je me décourage un peu, je me rappelle mon objectif et je suis repartie pour un tour ! Je dors, quand même, je te rassure, il faut bien, sinon c'est moi qu'on va devoir restaurer à défaut des livres ! » Et toujours une petite touche d'humour, il fallait bien !

Elle laissa son amie réagir, savourant à petites bouchées son plat parfaitement réussi, puis elle lui demanda, beaucoup trop curieuse de savoir : « Pardon, je suis une vilaine curieuse et je reviens dessus, mais qu'est-ce qui t'as décidée à faire cette exposition ? »



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MessageSujet: Re: Les confessions nocturnes - Fauste   Les confessions nocturnes - Fauste Icon_minitime30/7/2024, 18:40

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La table fut mise, une bouteille fut débouchée pour profiter du repas concocté par l'illustratrice qui cherchait à se faire pardonner par ce repas. Alice aimait cuisiner et partager avec les autres et sa voisine était également généreuse. Une fois à table, Fauste lui expliqua qu'elle avait un copain et ce dernier avait été très malade et très têtu avant de se faire soigner. Si la trentenaire ignorait les détails de cet événement, elle avait naïvement pensé qu'il avait été conduit à l'hôpital. L'autre blonde était soulagée que la situation soit terminée et il était temps pour elles de trinquer autour de ce retour à la normale. Les deux étaient revenus, tout le monde allait bien. Même si ce n'était que de l'apparence. Et tandis qu'elles levaient leur verre, la médium remarqua un détail.

- J'ignorais que tu avais rencontré quelqu'un et je te souhaite d'être heureuse avec lui, même s'il a tendance à frôler la mort en se montrant têtue. Enfin ... C'est plus qu'un copain, non ?

Elle leva sa main gauche en bougeant son annulaire avec un sourire malicieux. Le sien était libre depuis des années. Alice avait eu du mal à l'enlever à son arrivée à Baton-Rouge ayant besoin de temps pour accepter le divorce que Liam lui avait imposé en lui faisant un enfant dans le dos. Enfant dont il cherchait la garde à présent, sa femme refusant de la lui céder. Il était revenu vers elle, cherchant à lui rappeler à quel point ils avaient été heureux ensemble, qu'il aurait aimé que cet enfant soit le sien, à cette femme effacée qu'elle était en sa présence. Alice avait fini par comprendre qu'au-delà d'un espace de réconfort, il cherchait surtout de l'argent pour payer l'avocat qui prendrait le dossier. Et l'illustratrice lui avait donné le nécessaire, car s'il était un odieux personnage, il aimait son enfant, il aimait être père. Alors s'il lui avait assuré qu'elle pourra revenir quand bon lui semblera, elle n'avait pas donné de suite. Bref, cet épisode de sa vie était terminé même si elle ne doutait pas que Liam finisse par revenir dans l'espoir de la reconquérir d'une manière ou d'une autre. En vain.

La conversation dériva sur l'exposition qu'elle allait faire dans deux mois et elle put lire la joie si ce n'est de l'admiration pour ce que l'artiste prévoyait. Et si Alice n'imposait l'exposition à personne, elle proposait à ceux qui voulaient venir de passer. Le monde découvrira le visage de Wonderland, l'artiste mystérieuse derrière des œuvres horrifiques qui n'avaient fait aucune convention pour rencontrer les fans qui appréciaient son travail. Elle se contentait des commentaires positifs, se heurtant parfois à la haine des réseaux sociaux qui comparaient son travail à d'autres. Elle finissait par ne plus les lire, ni les positifs ni les négatifs pour se préserver d'une violence inouïe jetée par des jaloux incapables de faire le même travail. Fauste comptait venir, quitte à amener la personne qui voudrait la voir ce jour-là.

- Ramène la, y'aura pas grand monde de toute manière ! Plaisanta-t-elle lâchant un petit rire, la laissant reprendre, entendant les compliments et la bienveillance de sa voisine qui lui proposait son aide. Baissant la tête, un grand sourire sur les lèvres, gêné, elle ajouta : merci, j'espère que ça plaira et que ton intuition nous écoute ! Je jette tête la première dans l'inconnu. Je n'hésiterai pas mais normalement tout est rodé et sauf imprévu de dernière minute, normalement ça devrait aller. Faut que je fasse un discours d'après l'organisatrice et j'ai juste envie d'aller me cacher dans le trou d'une souris. Pourquoi avez-vous fait ce tableau ? me demandera-t-on. Prrrt, aucune idée, j'avais envie.

Elle avait haussé les épaules et lever les mains, mais ce n'était clairement pas ce genre de réponse qu'elle pourra donner. Et c'était loin de la réalité. Alice avait frôlé la mort et avait eu besoin de rapprocher ce sentiment avec l'amour, un sentiment qu'elle n'avait pas ressenti depuis très longtemps, pour dire en réalité, jamais. Pas dans ses souvenirs. Elle voulait toucher du doigt ce sentiment mais n'était pas capable. Elle ne l'avait jamais ressenti ni pour Liam, ni pour Peter ni pour les quelques rencontres qu'elle avait faites. Alors pourquoi ces tableaux débordaient autant d'amour. L'envie d'aimer ? Le rapport étroit entre la mort et l'amour, parfois très fin qu'il pouvait y avoir pouvait être très parlant. La mort de soi dans l'amour de l'autre. La petite mort pour parler de l'orgasme etc. La thématique lui parlait.

Et parce qu'elle n'aimait toujours pas être le centre de discussion, elle renvoya la balle dans le camp de l'autre blonde, s'intéressant aux dernières informations qu'elle avait eu. Fauste avait rejoint le Coven. La jeune femme venait seulement de rentrer là et comptait être en forme à partir de demain. Elle lui expliqua avoir la sensation de reprendre les études, ce qui était facilité par son métier qui l'obligeait à toujours apprendre, à s'intéresser aux nouveautés. Alice l'écouta attentivement, admirative de cette volonté de s'instruire, d'un dépassement de soi sur plusieurs domaines.

- Y'a de quoi avoir peur oui, glissa-t-elle comprenant très bien la peur de toucher du doigt cette magie quand l'illustratrice avait peur d'apprendre à maîtriser son don.

La chose rassurante était qu'elle était bien entourée. Que ce soit sa mentore ou Morgana qui l'épaulait - chose qui ne surprendrait pas la médium connaissait la sorcière qui avait besoin d'aider toutes les personnes qui l'entouraient. Ainsi son petit ami était également un sorcier appartenant au Coven. Alice eut un sourire à ses mots, voyant bien derrière cette logorrhée, la joie d'être ainsi soutenu et aimé par ses proches. Elle s'épanouissait dans un environnement sain pour apprendre et grandir en tant que sorcière. Elle poursuivit en lui expliquant qu'elle souhaitait aider les gens à travers des illusions. À l'image d'un thérapeute qui pourrait amener ses patients à toucher du doigt des difficultés pour les dépasser. Elle abordait ses craintes, ses difficultés tout en les balayant avec la motivation qui reprenait facilement le dessus. Fauste voulait faire le bien autour d'elle, à l'image de Morgana et de Dan. Comme quoi le Coven n'était pas si mauvais que ça. Elle voulait aider. Elle était motivée et Alice sentait émaner d'elle cette force de conviction qui l'amènera à toujours se dépasser. Sa conclusion la fit rire, attrapant son verre pour le lever à nouveau en direction de la sorcière.

- Je lève alors mon verre pour la future sorcière émérite que tu deviendras aussi bien entourée et qui a en soi les ressources nécessaires pour réussir. Je suis admirative par ce que tu dégages là à l'instant. En tout cas, je ne me fais pas de soucis pour toi et si je vois quelque chose qui pourrait dire le contraire, je te préviendrai. À toi, Fauste !

Parce qu'elle pourrait avoir des visions d'un avenir pour la jeune femme que ce soit dans ses rêves ou en la touchant. Alice ne maîtrisait pas son don mais pourrait la prévenir si elle voyait quelque chose. Elle leva donc son verre et but une autre gorgée avant de reprendre son repas dont l'assiette se vidait petit à petit. Ce fut Fauste qui reprit un peu après, profitant également du plat préparer par l'illustratrice, demandant à Alice ce qui l'avait poussé à se lancer.

- Oh et bien mon accident ... De l'année dernière. J'ai failli mourir, certains médecins pensaient que je ne me réveillerais pas comme si je ne voulais pas me réveiller. On n'a qu'une vie et jusqu'à ce moment, j'ai toujours pensé que j'étais incapable de le faire, de faire beaucoup de chose en vrai. J'ai rien à perdre et si ça ne marche pas, j'aurai essayé. J'ai toujours eu peur du jugement des autres, du regard des autres. Ça remet beaucoup de choses en perspective ce genre d'événement. Tout n'est pas encore gagné et j'ai de vieux démons qui ressortent mais il faut croquer la vie à pleines dents quand c'est possible.

Elle n'irait pas se jeter du haut d'un pont pour faire du saut à l'élastique ou faire un saut en parachute mais elle acceptait des choses qu'elle s'était refusée. Elle avait acheté une voiture, un cottage, elle faisait une exposition et profitait de quelques soirées pour aller danser dans des bars dansant, apprenant de nouvelles danses, profitant de belles rencontres quand c'était possible. Sans le spectre de Peter derrière pour l'empêcher de respirer. Et son visage s'assombrit en pensant à lui. Il était temps de lui dire ce qui l'a travaillé. Alice était soulagée que sa voisine soit revenue parce que cela lui pesait. Posant ses couverts, elle repris après, plus gravement.

- D'ailleurs, je voulais m'excuser d'avoir pris mes distances avec toi. J'ai ... Tu avais raison pour... pour Peter. J'aurai dû t'écouter.



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MessageSujet: Re: Les confessions nocturnes - Fauste   Les confessions nocturnes - Fauste Icon_minitime6/8/2024, 15:25

Il lui semblait bien étrange de pouvoir parler de sa relation avec Constantine, autant parce qu'il était explicite qu'ils étaient ensemble, enfin, que parce qu'il avait choisi de lui-même que ça se saurait. Ce n'était pas qu'une question de fonction au sein du Coven, ou de danger potentiel que cela pouvait représenter, mais aussi parce que Fauste aimait avoir ses petits secrets, garder des choses pour elle-même. Elle qui n'avait pas peur de montrer son corps, ni même de dire à haute voix ses sentiments les plus positifs, elle avait une sorte de pudeur quand il s'agissait de ces choses-là, et encore plus avec lui qu'avec quiconque elle avait pu avoir dans sa vie. C'était un point d'accroche qu'elle avait pu avoir par le passé, dans le peu de personnes avec qui elle avait pu avoir une relation. Elle pensait qu'il n'y avait pas besoin que le monde entier soit au courant, que juste les concernés, et peut-être quelques proches devraient suffire. Pourquoi vouloir que tout le monde le sache ? Elle s'était souvent sentie comme un trophée qu'il fallait avoir eu dans sa collection, une manière de rouler des mécaniques parce qu'ils étaient avec elle, mais loin de trouver la chose flatteuse, elle la trouvait presque humiliante, et ce n'était pas dû à un manque de confiance en elle. Elle aimait simplement profiter des petites choses du quotidien sans avoir l'impression d'avoir dix paires d'yeux en permanence par-dessus son épaule, pour donner un avis sur la manière dont les choses se passaient chez elle. D'une certaine manière, avec Constantine, il n'y avait pas vraiment eu le choix : au début, ils n'avaient absolument pas eu conscience de ce qu'ils faisaient, ni où ils étaient en train d'aller, quand ils avaient commencé à en prendre conscience, ils n'avaient pas voulu des questions gênantes, ni mettre l'autre en danger.
Quand Alice désigna son index pour souligner le fait que c'était plus qu'un copain, l'islandaise ne put s'empêcher de sourire, et même de rire légèrement, en haussant les épaules.

« C'est vrai que ça peut avoir l'air très officiel, comme ça, mais c'est plus... » Elle regarda l'anneau qui ornait son doigt en réfléchissant à comment ils pouvaient bien voir la chose. « C'est plus une manière de me faire oublier tout le mal que je peux penser de moi-même, de me rappeler que même si je me sens nulle, complètement inutile et que j'ai peur de lui faire perdre son temps, ce n'est pas ce qu'il pense. Comme un post-it, mais en plus joli. Il n'est pas très doué avec les mots, enfin de ce qu'il dit, c'est sa manière à lui de me rappeler que je suis importante pour lui... Après avoir passé des mois à se tourner autour comme deux ados timides, il fallait bien ça pour mettre un peu de clarté. »

Elle plaisantait en partie, d'un autre côté, ils avaient passé des mois, et des mois à dormir ensemble pour soi-disant limiter les insomnies, alors qu'en réalité ils faisaient plutôt la chasse aux excuses pour se voir. Ils avaient désespéré leur entourage, elle le savait -comment n'aurait-elle pas pu le savoir en captant bien des pensées autour d'elle ?-, mais ils avaient eu besoin de ce temps, de cette lenteur pour mieux se trouver. Se trouver sans avoir les avis et les pensées des autres pour leur faire comprendre qu'ils devraient peut-être envisager les choses autrement. Après tout, tant qu'ils ne faisaient pas de mal, ils pouvaient bien faire ce qu'ils voulaient, non ? Y compris s'ils prenaient un réel plaisir à travailler chacun à ses tâches dans la même pièce, au lieu de se regarder un film sur le canapé, comme pouvaient préférer faire bon nombre de personnes. Pour cette raison, et parce qu'ils étaient atypiques en beaucoup de points, ils n'avaient pas forcément eu envie de se demander si la symbolique de deux anneaux allait être un peu trop forte pour définir leur statut aux yeux des autres. Ils n'étaient plus à une bizarrerie près.

La conversation alla sur quelque chose qui plaisait beaucoup plus à Fauste. Elle adorait Constantine, là n'était pas la question, mais elle préférait lui parler pendant des heures que parler de lui pendant des heures. Savoir que sa voisine faisait une exposition la mettait en joie. C'était un beau projet, l'accomplissement de quelque chose, et si on lui avait proposé ou même juste donné l'opportunité de le faire, c'était bien qu'elle avait un talent suffisant pour que ce soit forcément une réussite. En revanche, pour le faire de prendre la parole en public, Fauste comprenait parfaitement ce qu'elle voulait dire. Elle-même n'aimait pas être le centre de l'attention, et si elle était parvenue à prendre sur elle quand elle avait dû présenter son mémoire de fin d'études, en devant passer outre le fait qu'elle ne se sentait pas légitime dans ce qu'elle pouvait bien avoir à raconter, elle pouvait remercier deux choses : le fait d'avoir fait de la danse pendant des années, elle était habituée à être scrutée par plusieurs paires d'yeux, et le fait qu'elle avait dû le faire dans une langue qui n'était pas la sienne. Devoir se concentrer sur le fait de ne pas faire de fautes, d'être intelligible, était une bonne chose, car elle en avait oublié tout ce qui l'environnait. Elle rit légèrement en entendant la conclusion d'Alice sur le fait qu'elle ne saurait pas trop quoi dire.

« Je ne peux que te comprendre. J'admire les gens qui arrivent à trouver une réponse à tout, à t'expliquer qu'ils ont voulu faire ou dire telle ou telle chose, comme si tu devais absolument vouloir faire passer un message à la terre entière à chaque fois que tu prenais un crayon ! » Elle rit légèrement à nouveau, puis reprit : « Si ça te dit, je peux toujours demander à mon père, et à de ses amis. Mon père était illustrateur pendant longtemps, et maintenant il est auteur de comics, il travaille beaucoup avec un autre auteur. Ils ne font pas beaucoup d'interview, et je te jure qu'ils sont tous les deux nuls pour prendre la parole en temps normal, mais dans ces moments, qu'est-ce qu'ils en trouvent, des trucs à dire ! Et ils te justifient tout, même ce qu'ils ont fait sans réfléchir. Deux escrocs. Et pour lui coup, mon père serai ravi d'aider, donc tu n'hésites pas. Si tu veux, je peux te mettre en contact avec lui. Qui sait ? Ça peut aussi être le début d'une collaboration au passage. »

Eternelle optimiste, Fauste se disait toujours qu'il y avait plusieurs occasions en une, mais d'un autre côté, elle n'aurait forcé la main de personne. Son père était toujours ravi d'être utile, et même s'il en avait effrayé plus d'un avec ses airs un peu durs de prime abord, l'une de ses oreilles percée de haut en haut et ses tatouages allant du cou jusqu'aux chevilles en passant par les poignets, il n'y avait pas plus gentil qu'Erik. Sa fille disait elle-même en riant qu'il ressemblait à un taulard, mais il suffisait qu'il se mette à parler avec les gens et sourire un peu pour rassurer rapidement ses interlocuteurs. Comme sa fille, une voix douce, un humour de lutin espiègle, et une douceur de caractère telle que l'on se demandait souvent ce qu'il s'était passé pour qu'il ait cette apparence qui lui avait valu des jugements souvent trop sévères toute sa vie. Il le disait lui-même, quelque part il aurait pu faire autrement et s'éviter bon nombre de remarques et d'a priori. On n'agit pas toujours comme n devrait le faire, c'était peut-être ce qu'il fallait retenir.

Quand elle parlait de choses qui la passionnaient, Fauste avait tendance à s'emballer. C'était sans doute cette raison qui avait amené le Ptah à s'intéresser à elle, lui qui était intarissable aussi dans son domaine, alors qu'il pouvait sembler si peu bavard d'extérieur. L'islandaise avait en revanche un côté peut-être enfantin, qu'elle n'aimait pas trop mais qui semblait pourtant ne pas trop déranger son entourage, on lui avait même déjà dit que c'était mignon - « trop » mignon, paraissait-il-, mais elle n'en croyait rien. D'un autre côté, elle était incapable de mentir, de feindre, même quand elle aurait aimé maîtriser certains aspects de sa personne. Dans tous les cas, Alice ne sembla pas dérangée plus que les autres, et au contraire leva son verre, amenant Fauste à faire de même avec une petite moue un poil timide. Elle ne se mettait pas tellement en avant, et si elle devait être honnête, elle était souvent persuadée qu'elle n'atteindrait jamais son but, car elle partait de trop loin, mais elle n'avait jamais été du genre à baisser les bras, bien au contraire. Elle irradiait de bonheur rien qu'à l'idée que tout ne soit pas facile, et qu'elle allait devoir travailler, encore et encore. Elle avait le goût de l'effort chevillé au corps, peut-être un peu trop, mais pour rien au monde, elle n'aurait abandonné cette combativité. Pour une fois qu'il y avait un domaine dans lequel elle en avait...

Les deux blondes avaient eu leur lot de peine, et comme beaucoup de personnes qui avaient vraiment souffert, ça ne se voyait pas nécessairement à chaque fois. On l'apprenait au détour de conversation, mais d'un autre côté, on ne trouvait pas la chose étonnante, au vu de ce que l'autre était, de son comportement, de sa manière de penser... Mais jamais les blessures n'affleuraient de trop.

« On regrette plus souvent ce qu'on n'a pas fait que ce que l'on a fait, alors tu as bien raison d'essayer. De toute façon, tu ne sauras pas tant que ça ne sera pas le cas et peut-être que ça t'ouvrira d'autres opportunités encore, que tu n'avais même pas imaginées. Il faut oser, dans la vie, personne d'autre ne le fera pour toi. Je suis vraiment contente pour toi, ça va être génial, j'en suis sûre ! » Sa nature enjouée prenait souvent le dessus quand d'autres lançaient des projets, elle avait autant envie de les voir réussi qu'elle s'appliquait à réussir elle-même, et c'était d'ailleurs souvent dans les autres qu'elle puisait sa force, même si ce pouvait sembler un peu étrange, ou carrément niais, dit de cette manière.

Une chose s'assombrit, sans que cela ne vienne entacher la bonne humeur de l'apprentie sorcière, elle ne pouvait cependant pas ignorer que le ton était moins léger, désormais. Légèrement moins léger. Elle n'avait rien demandé à propos de Peter, cet homme qu'elle avait rapidement désapprouvé, autant à cause de son attitude de ce qu'elle avait pu capter de lui, mais elle s'était bien dit que si Alice était de retour, seule, c'était qu'il avait quitté le paysage. Elle aurait pu s'en réjouir si elle ne se doutait pas que malheureusement, la séparation n'avait dû se passer dans de très bonnes conditions, ni pour des raisons futiles. Fauste avait connu le fait d'être manipulée par quelqu'un, même si elle l'avait été avec une aide magique, et elle ne savait que trop bien à quel point l'esprit avait besoin d'un très fort déclencheur pour se prendre un électrochoc et décider de partir. Souvent un peu trop tard pour son propre bien, et il fallait avoir un mental d'acier pour se donner une chance de rebondir rapidement, même si ce n'était souvent pas aussi simple qu'il n'y paraissait. Elle regarda un moment sa voisine, qui semblait attendre. Elles abordaient enfin ce sujet, mais si la blonde s'imaginait que l'islandaise allait lui faire un reproche, elle se trompait. Fauste en était tout bonnement incapable. Elle parla tout bas.

« Je suis désolée si j'avais raison. Si c'est le cas, ça veut dire que tu as dû passer par des moments particulièrement difficiles. J'aurais préféré me tromper, même si j'imagine que le plus important c'est que tu sois là, aujourd'hui et que tu te sois sortie de cette situation. » Elle marqua une légère pause, puis mit les pieds dans le plat : « Tu veux en parler ? » Elle leva une main en signe d'apaisement. « Ne te sens pas obligée de le faire, c'est seulement si tu le souhaites. Je ne t'en veux pas, tu ne me dois aucune explication. Si tu en as besoin, je t'écouterai jusqu'au bout, quel que soit le moment. Et si ce n'est pas ce soir, ce n'est pas grave. »



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MessageSujet: Re: Les confessions nocturnes - Fauste   Les confessions nocturnes - Fauste Icon_minitime12/8/2024, 14:46

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Quand elle regardait la sorcière proche de la trentaine, elle avait parfois l'impression de voir son reflet même si Alice avait plus confiance en elle, elle restait assez discrète et introvertie pour ne pas faire le clown en société. À ne pas vouloir faire de vague également. Observatrice, l'illustratrice avait remarqué l'anneau à son doigt, un symbole qui pouvait en dire long sur leurs sentiments respectifs, mais qui pouvait être également trompeur. Si Fauste avait connu des hommes du même acabit que Peter, attirait-elle toujours ce genre d'individu, par une personnalité plus fragile que d'autres femmes qui s'affirmaient plus facilement ? Un anneau pour la contrôler ? Pourtant, la jeune femme se montra rapidement rassurante. Le sentiment de lui faire perdre son temps. Si dans une mémoire effacée, elle avait ressenti cela, elle ne se rappelait pas avoir frôlé du doigt ce sentiment. Fauste regardait l'anneau avec une tendresse qui n'échappa pas aux regards de la médium.

- C'est un joli post-it, conclut-elle avec un sourire. C'est une période assez amusante, cette période à se tourner autour même si la suite reste tout aussi intéressante.

Les papillons dans le ventre, le cœur qui s'emballe à la vue de l'autre, à la réception d'un message, les sourires qui naissent à la simple pensée de l'autre. C'était ce qu'elle avait pu lire dans les romans plein de mièvrerie. Si Alice avait pu ressentir ces sensations, cela n'avait jamais été réciproque et c'était une époque lointaine. Elle avait attiré les attentions d'autres, mais jamais elle n'avait ressenti ça pour eux. Liam ou Peter. Elle s'était mariée avec le premier, elle l'avait aimé à sa manière quand lui était un moyen pour fuir son domicile. Et il l'avait aimé, c'était certain. Alors elle était heureuse pour la sorcière qu'elle puisse se sentir épanouie dans une histoire qui semblait lui faire beaucoup de bien. Même s'il semblait avoir assez de caractère pour ne pas vouloir se faire soigner. Affaire à suivre.

La conversation se poursuivit sur l'exposition que l'illustratrice préparait et qui était quasiment prête. Seul hic, le discours qu'elle devrait avoir. Certes, elle pourrait remercier les organisateurs, mais parler de l'inspiration qui l'avait poussé à peindre ces œuvres, elle ne saurait expliquer. Des rêves, des sensations, des choses qui lui traversaient la tête sans trop savoir pourquoi comme des flash. Avoir frôlé la mort avait joué sur tout ça. Mais donner du sens à tout ça pour que ça ait un sens pour les autres, c'était assez ridicule. L'importance était ce que cela apportait à chacun, ce que cela évoquait, provoquait en soi. Certes, l'intention de l'auteur était importante pour que le sens de l'œuvre ne soit pas détourné, mais des œuvres comme les siennes seraient difficilement appropriables par des groupuscules obscurs.

- Je les admire également, glissa-t-elle en levant sa fourchette. Surtout qu'il m'a fallu du temps pour comprendre que je n'inventais rien, que pour presque tous mes tableaux, ce n'était que le fruit de mes messages qu'on m'envoyait et non de mon esprit torturé d'artiste. La bande dessinée est une commande où j'ai assez de liberté dans un cadre bien défini. Là, j'ai l'impression pour une fois de créer à partir de rien, et c'est quelque chose d'important pour moi.

Si seulement elle pouvait savoir qu'elle était à côté de la plaque. Que tout ce qu'elle avait peint était des souvenirs perdus d'une vie qu'elle avait oublié. Quand elle s'en rendrait compte, la chute n'en sera que plus dure. Fauste proposa de demander à son père, illustrateur pendant des années avant de devenir dessinateur pour des comics. Avec un autre, ils avaient la capacité de parler pendant des heures sur leurs œuvres.

- Comment s'appelle ton père ? Demanda-t-elle et elle écarquilla les yeux à sa réponse, répétant. Ton père est Erik Fergusson ? Vraiment ? Je connais certaines de ces illustrations plus que son travail sur les comics, mais je veux bien que tu lui en parles à l'occasion, s'il a quelques conseils à me donner.

Son père n'était pas un des plus connus dans le monde artistique, mais il était important de connaître ses pairs et leurs œuvres. Là où Alice avec ses airs de hippie ne donnait pas l'image des horreurs qu'elle était capable de dessiner quand son père, atypique, pouvait terrifier au premier coup d'oeil, mais son art montrait la profondeur de sa vision du monde. C'était presque dommage qu'il se soit redirigé vers les comics.

La conversation battait son plein et elles purent parler de ce que devenait Fauste, une future sorcière qui avait un bel avenir devant elle, même si elle ne le voyait pas de la même manière. Alice leva son verre et elles purent trinquer à nouveau. Elle se bien incapable de se lancer dans une aventure comme la sienne, bien trop à l'aise dans son quotidien, même s'il ne fallait pas nier que l'exposition était le grand changement dans sa vie. Ce qui faisait du bien et qui était terrifiant. Elle allait révéler qui était Wonderland après presque vingt ans à se cacher derrière ce pseudo, cette absence d'identité qui avait poussé l'imaginaire des uns et des autres. Si on s'attendait à voir une personne comme Erik, ce serait une grande blonde timide qui apparaîtrait.

Alice avait presque fini son assiette quand Fauste s'intéressa à ce qui l'avait poussé à se lancer dans l'exposition et les bons mots de la sorcière firent chaud au cœur de la blonde qui la remercia. La vie devait être vécue et il ne fallait pas passer à côté. La peur de l'échec poussait trop souvent les gens à ne pas agir, car personne ne leur avait appris que l'échec faisait autant avancer que la réussite. L'illustratrice avait l'intention de profiter, rien que par l'achat de ce cottage et la tranquillité que cela lui offrait même si elle n'était pas loin du territoire des loups-garous.

Ces pensées l'amenèrent à une des raisons qui l'avaient poussé à la voir ce soir. La nécessité de s'excuser d'avoir pris ses distances avec la sorcière car incapable d'entendre les mises en garde. Il avait fallu qu'il l'éloigne de tous, qu'il lève la main sur elle, lui impose un rapport forcé et que Dan voit sous les couches de maquillage les marques de son passage pour qu'elle s'éloigne de lui. Forcé et contrainte, car elle aurait pu rester avec si le soignant ne l'avait pas vu. Mais aujourd'hui, elle était en sécurité, Peter n'avait plus donné signe de vie. Fauste aurait préféré avoir tort.

- Merci. Il n'y a rien à dire en vrai. Il a été ce qu'il était, sans les apparences, les faux sourire et les belles paroles. Il a réussi à m'éloigner et à faire en sorte que je cède à ses intentions. Et sans l'intervention d'un ami qui m'a sorti de là, j'y serai probablement encore et j'ignore jusqu'où ça aurait pu aller. Je suis rentrée en début de mois et j'espérais te voir plus tôt pour exprimer mes regrets par rapport à cette distance que j'ai mise avec toi. Je, je n'étais pas capable de l'entendre. J'espère que tu pourras me pardonner.

Alice avait vécu la peur au ventre et pourtant, le monde du surnaturel était terrifiant, mais à côté, la nuisance et la toxicité d'un simple humain avait réussi à fissurer sa psyché. Il n'était pas allé très loin, cela aurait pu être pire. Alice cédait à ses demandes, sans lever la voix, sans se battre, résignée à être ce qu'il voudrait qu'elle soit. Une âme fragile malléable. Sans Dan qui avait mis le doigt sur ce qu'elle avait cherché à lui cacher, elle aurait certainement annulé son exposition et se serait mise en retrait du monde. Pour éviter des colères, des gestes violents alors qu'elle considérait qu'elle n'était pas atteinte par son comportement, mais ses réactions étaient en lien avec celle de Peter. Alors maintenant libérée, elle espérait pouvoir retrouver son quotidien, revoir ceux qu'elle avait éloigné et n'avait pas cru.


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Dream until the dream come true
Every time when I look in the mirror
All these lines on my face getting clearer
The past is gone
And it went by, like dusk to dawn
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MessageSujet: Re: Les confessions nocturnes - Fauste   Les confessions nocturnes - Fauste Icon_minitime10/10/2024, 11:58

Avoir confiance en elle, en ce qu'elle était, serait une tâche qui lui prendrait sans doute toute sa vie. Fauste ne se faisait aucune illusion sur le sujet, mais n'en souffrait pas pour autant. Elle savait qu'il resterait des questions sur lesquelles elle ne pourrait jamais vraiment gagner la partie, mais il y en aurait d'autres pour lesquelles elle finirait par prendre doucement confiance en elle, une étape après l'autre. Ce n'était que la continuité de l'ambivalence qu'elle vivait déjà : celle de ne pas craindre de restaurer une toile de maître, sûre de savoir reproduire ce qu'il faudrait et d'au contraire avoir peur de ne jamais être assez douée pour publier ne serait-ce qu'un croquis sur un réseau social, alors qu'elle était capable d'imiter les plus grands. Cette estime meurtrie, Constantine avait sans doute espoir de l'aider à travailler dessus, se doutant sans lui dire qu'il n'était pas au bout de ses peines, mais c'était surtout à elle qu'incombait cette lourde tâche. Et elle n'avait pas peur de se remonter les manches.

En parlant de son compagnon, elle acquiesça à la remarque d'Alice quand elle parla de ces instants à se tourner autour. C'était vrai, c'était sans doute le moment le plus palpitant d'une relation, dans presque toutes les relations, d'ailleurs. Fauste se demandait même si certaines personnes n'étaient pas accro à cette sensation au point de ne tenir que jusqu'à ce moment ne s'étiole. Il y avait sans doute mille raisons au fait que les gens enchaînent les relations, mais celle-ci ne lui paraissait pas complètement idiote. Elle garda pour elle ces réflexions et se contenta de pincer les lèvres dans un sourire en acquiesçant d'un petit signe de tête pour confirmer ce que venait de dire la blonde, peut-être avec une pointe de timidité complice en repensant à certains détails qui n'auraient pas ému grand monde à part elle-même. Le Ptah et elle demeuraient deux drôles d'oiseaux, il fallait bien le dire. Sentir la chaleur de sa jambe tout proche de sa cuisse quand il travaillait à côté d'elle, lire un livre qu'il lui avait recommandé avec l'impression que c'était lui qui pointait les éléments à retenir, deviner sa silhouette se mouvoir derrière le comptoir du Moonshiner quand elle arrivait et savoir qu'elle pourrait croiser son regard, même de loin -surtout de loin... Elle qui n'était pas romantique se découvrait l'être un peu finalement, et le plus ironique dans l'histoire était qu'on la trouvait vraiment trop pragmatique pour l'être. Même là-dedans, elle parvenait encore à être complètement perchée.

Alice et Fauste avaient au final pas mal de points communs, et quelque chose disait à l'islandaise que la liste n'était pas terminée. Elle ne montrait déjà pas ses créations, donc la question ne risquait pas de se poser, mais si elle avait dû parler de ses intentions, elle en aurait été bien incapable. Il y avait peut-être ce qu'elle faisait pour se sortir de mauvaises pensées de la tête, mais ces dessins-là, elle ne les montrait que rarement, voire jamais. Il fallait tomber dessus par hasard si elle les avait laissé traîner sur son bureau ou carrément fouiller dans ses affaires, et une fois que l'on était tombé dessus, il fallait bien dire que le message était assez explicite pour ne pas réclamer d'explication supplémentaire. Enfin, si, généralement on lui en demandait, mais plus pour s'assurer qu'elle n'allait pas aussi mal que ce que l'on aurait pu penser de prime abord. Ses dessins et histoires étaient parfois aussi sombres qu'elle n'était lumineuse et joyeuse dans la vraie vie, ils étaient sa manière d'évacuer ce qu'il y avait de négatif et qui traînait dans son esprit. Ses petits secrets qu'elle voulait bien garder pour n'inquiéter personne.

Alors que sa voisine parlait, elle comprenait en partie ce qu'elle voulait dire. En partie seulement, parce que ce n'était pas exactement le même genre de registre. A force de capter les pensées des autres, elle se demandait parfois si elle pensait réellement ce qui se trouvait dans sa tête ou si elle avait été influencée par les autres. Avec le temps, elle avait bien sûr appris à discerner ses propres pensées de celles des autres, mais il fallait aussi prendre en compte la dure vérité selon laquelle nous restions la résultante d'un nombre infini de facteurs de notre entourage. L'on pouvait prendre le contre-pied ou suivre ce qui nous entourait, quoi qu'il arrivait, cela restait une influence. A la conclusion d'Alice, Fauste sourit :

« Je pense que c'est une chose que tu devrais dire, peut-être même la plus importante à dire. Ces œuvres, c'est toi, et pas le cadre qu'on a pu te demander de respecter. Une sorte de rencontre entre ceux qui étaient déjà fans de ce que tu fais avec l'esprit qui se cache derrière ton talent. Une sorte de présentation, on pourrait dire... Pardon, je divague. »

Elle rit légèrement et reprit le cours de la conversation. Elle avait mentionné son père, ainsi qu'un autre comparse de la maison d'éditions pour laquelle Erik travaillait, et même si elle souriait, elle dut admettre qu'il n'y eut pas de réelle surprise au fait que sa voisine connaisse le travail de son père. Il n'était pas spécialement connu en général, mais dans le milieu, il avait fini par faire sa petite place. Grandir sous l'aura de cet auteur de talent et en ayant la même passion avait largement contribué au fait qu'elle n'avait pas eu confiance en ses propres talents, qu'elle avait choisi de restaurer les œuvres des autres.

« Oui, j'ai à la fois la chance et l'infortune d'être sa fille. Je lui demanderai, je pense que vous aurez beaucoup de choses à vous dire. Lui, c'est l'inverse de toi. Il était bloqué en tant qu'illustrateur, parce que quelqu'un dans sa maison d'éditions s'assurait qu'il ne fasse rien d'autre. Le côté marginal ne devait pas lui plaire. Il a pu se consacrer à ce qu'il voulait quand la personne en question est partie à la retraite et raconter ses propres histoires au lieu de simplement illustrer celles des autres. Il n'est pas doué avec les mots, c'est pour ça qu'il travaille avec un auteur pour améliorer les dialogues. Il lui arrive aussi de faire des toiles avec un peu tout et n'importe quoi, des sculptures, dont il ne fait profiter que nous... Tu me fais penser que j'aimerais bien entendre l'explication qu'il y a derrière le grille-pain qu'il a démonté pour disperser les pièces de sorte à ce que l'intérieur ressorte comme des tartines. Si tu arrives à l'avoir, ma mère et moi sommes très curieuses de savoir ce qu'il s'est passé ce jour-là. » Elle marqua l'amusement qu'il y avait derrière cette anecdote. Elle savait de qui elle tenait pour son côté loufoque et les idées saugrenues, même s'il fallait admettre que son père la battait parfois à plates coutures.

Tout en continuant leur repas, elles avaient continué à échanger sur l'exposition d'Alice jusqu'à arriver sur un sujet beaucoup moins joyeux. Si Fauste était contente pour l'événement, elle n'en était pas moins satisfaite de savoir qu'elle s'était sortie de l'emprise de cet homme qui lui avait fait si mauvaise impression quand elle l'avait vu. Elle écouta la médium sans l'interrompre, ne pouvant que compatir à ce qu'elle avait vécu. Elle fut finalement presque peinée de voir que finalement, la blonde craignait presque plus qu'elle ne la pardonne pas que de ne pas s'en remettre. Fauste émit un soupir silencieux et prit un moment pour plonger son regard dans celui d'Alice. Elle pensa un moment choisir ses mots avec soin, mais la fatigue et l'alcool n'aidant pas, elle capitula et prit le choix de la simplicité, comptant sur sa sincérité pour ne pas être mal comprise :

« Il n'y a rien à te faire pardonner, Alice, parce que je ne t'en veux pas le moins du monde. Le plus important, c'est que tu sois en sécurité aujourd'hui, et que tu fasses des choses pour toi, que tu avances dans ce que tu voulais faire. Le reste n'est qu'un peu de temps qui a passé. On aurait très bien pu avoir une fin d'année chargée, toi et moi, et passer des mois à se croiser sans vraiment se voir. Ce qui n'est pas très loin de la vérité, si l'on prend en compte le fait que je n'ai donné quasi aucune nouvelle à personne pendant deux semaines. Alors tu vois, il n'y a vraiment rien de grave. »

Elle lui fit un sourire encourageant en espérant que ses paroles pourraient apaiser, ne serait-ce que partiellement, les craintes de la blonde. Après tout, ce genre de blessure ne guérissait pas en un jour, elle ne le savait que trop bien.



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Les confessions nocturnes
@Fauste Erikdottir & Alice Atkins


Pour une fois dans sa vie, Alice avait l'impression de créer pour elle, par elle et sans rien qui la guide si ce ne sont ces sentiments, sa sensibilité créatrice. Quand elle se souviendra, elle réalisera qu'elle avait tort. Elle n'avait encore une fois rien créé par elle-même, mais ne peignait seulement que des souvenirs d'une vie effacée. La question finirait par se poser sur sa qualité de créatrice, d'artiste, car elle répondait à des commandes ou dessinait ce qu'elle appelait le Destin lui envoyait en guise de message. Mais là, l'illustratrice était ravie de pouvoir penser qu'elle avait réussi là où toute sa vie, elle avait échoué. Alice écouta la réponse de sa voisine et hocha de la tête. Autant être sincère dans ce qu'elle dirait aux quelques personnes qui viendront à son vernissage.

- C'est presque se mettre à nu, sans nu, plaisanta-t-elle.

Montrer une partie de soi. Et elle n'imaginait pas un instant tout ce qu'elle révélerait d'elle, de ses sentiments pour un certain procureur même si la fin des tableaux ne semblait pas raconter des moments de leur vie. Dellamorte, dellamore. Le lien entre l'amour et la mort.

La conversation se poursuivit et Alice apprit que Fauste était la fille d'Erik Fergusson, un artiste que la blonde connaissait. S'il n'était pas le plus célèbre, ces œuvres lui parlaient. Elle accepta que la sorcière lui demande des conseils pour le vernissage. Elle tiqua sur une information, mais laissa la blonde poursuivre, cette dernière lui expliquant qu'il avait été bloqué en tant qu'illustrateur à cause d'un employé de la maison d'édition. Mais il a fini par s'épanouir au départ à la retraite dudit employé. Elle laissa échapper un petit rire pour la suite.

- Un grille-pain ? Répéta-t-elle amusée par la scène qu'elle imaginait sans difficulté. L'art contemporain a toujours été un mystère pour moi à vrai dire !  

Elle aurait bien des explications à donner mais elle les gardait pour elle. Sa sensibilité n'était pas touchée par l'art contemporain. Elle comprenait les intentions des artistes derrière les formes, les tableaux blancs et autres. Elle semblait vieux jeu à côté, à apprécier le temps de travail derrière chaque œuvres ainsi que les réflexions qu'il y avait derrière. Et avant de changer de sujet, elle revint sur ce qui l'avait fait tiquer un peu plus tôt.

- Pourquoi dis-tu avoir l'infortune d'être sa fille ? Il est à l'image des artistes : excentriques et paumés ?

Parce que les artistes étaient un peu dans leur monde. Elle l'était elle la première et il était difficile de l'en sortir. Alors elle pourrait comprendre que son père le soit également et que cela impacte sa vie de famille. C'était peut-être une chance au final que la FIV n'ait jamais fonctionné avec Liam. Quelle mère aurait-elle été à vivre dans ce monde, dans les songes, à devoir fumer pour dormir, à passer des heures sans réaliser que le temps passait ? Non, c'était une bonne chose. Alice n'avait accepté tous ces protocoles, ces traitements pour répondre au besoin de paternité de Liam. Et il avait fini par avoir une enfant d'une autre qui avait fini par vouloir se débarrasser de lui et garder sa fille uniquement pour elle. Mais Liam avait décidé de se battre et avait demandé une aide financière à Alice. Alors que c'était lui qui avait demandé le divorce. Et pourtant, elle avait accepté pour se débarrasser de lui et parce qu'elle gardait une forme d'attachement à cet homme avec qui elle avait passé dix ans de sa vie.

Le repas se poursuivait alors qu'elle prenait des nouvelles de chacune et alors qu'Alice avait presque fini son assiette, elle vint s'excuser de la distance qu'elle avait prise avec la sorcière. Elle lui avoua cette réalité que Fauste avait su voir, avait voulu la mettre en garde. L'artiste n'avait pas été capable d'entendre la sonnette d'alarme. Et si Peter était sorti de sa vie grâce à Dan, elle craignait que ses proches ne lui pardonnent pas son éloignement. Fauste soupira, plongea son regard dans celui-ci azuré de l'illustratrice avant de lui répondre qu'il n'y avait rien à pardonner. Que l'important était qu'elle soit là aujourd'hui, libre et que la vie et le rythme de chacune aurait pu les éloigner sans cette histoire. Alice sourit en retour au sien et baissa les yeux sur son assiette à présent vide. Un poids s'enlevait de ses épaules. Elle était soulagée de savoir qu'elle n'en tiendrait pas rigueur.

- Merci, lui dit-elle simplement, attrapant son verre pour en boire une gorgée, se sentant réellement soulagée et le faisant savoir d'un soupir.

Alice aura ça en moins à penser. Même si elle pensait être sortie de cette histoire avec la prise de distance, elle ne se doutait pas des peurs que cela allait révéler. Des angoisses que cet homme aura su insuffler en elle. La peur d'un rapport non consenti, la peur d'un coup. La pression, la culpabilité, les menaces sous-entendu. Elle n'avait touché seulement du doigt les prémices d'une vie de misère où elle aurait fini par disparaître sans que l'on se souvienne d'elle tant il aurait mis de la distance avec ses proches. Il lui faudra du temps. Elle finira par lui demander :

- Comment as-tu su ? Pour Peter ? Tu as eu toi aussi, un Peter dans ta vie ?



by eden memories



Dream until the dream come true
Every time when I look in the mirror
All these lines on my face getting clearer
The past is gone
And it went by, like dusk to dawn
Isn't that the way?
Everybody's got their dues in life to pay
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